Rose Perrin : $b roman
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s’abaissaient très vite les paupières, sur un heurt, une parole vive. Kéravan appartenait à la vieille souche bretonne. De sa race, il tenait la volonté énergique, l’endurance à la peine, l’obstination têtue, les convictions religieuses, le courage simple... et rarement--quelques privilégiés, seuls--apercevaient en lui une très fine et très ombrageuse sensibilité. Certains hommes de sa compagnie aussi le connaissaient sous ce jour--généralement les plus déshérités, les malheureux. Ces derniers le nommaient entre eux affectueusement: «le petit père Kéravan». Lorsqu’un soldat allait mourir, c’était lui parmi les autres officiers qu’on allait prévenir. Lui seul était capable de recevoir les dernières recommandations, les souvenirs, les bouts de lettres maculés de terre et de sang qu’il fallait envoyer aux familles avec un mot ému, des délicatesses pour annoncer les tristes nouvelles... Kéravan était encore le seul qui savait dire, sans livre, les prières des agonisants, quand le prêtre ne pouvait venir. Lui seul trouvait, à la minute suprême, les paroles qui réconfortent. On avait confiance en lui. Si, au moment des attaques, les regards se portaient avec ensemble sur le lieutenant de Louvigny, commandant de compagnie, les plus faiblards pensaient: --Le petit père Kéravan est là, à côté, quand on y sera (dans la tranchée ennemie) il se battra avec nous. Et ils se redressaient... rassurés. C’était, à cette popote, devant le lapin sauté du cuistot Bertrand, un joyeux quintette, tous anciens de l’École, sauf Jacquet et Claudal. Le premier avait passé par les rangs et monté rapidement en grade depuis les premiers jours de la guerre où il s’était distingué sur la Marne. De Roysel, irréprochable, astiqué comme à la parade, ce qui ne l’empêchait pas, disaient ses hommes, d’en «mettre un coup» quand il le fallait. Claudal, avocat, beau parleur, détonait un peu dans ce milieu de soldats. Et enfin Louvigny, plus jeune que les autres, et déjà commandant de compagnie en remplacement des anciens, tués. Il avait fait la Marne, il s’était battu dans la Somme, dans l’Aisne, et maintenant en Champagne, n’attrapant jamais que des blessures insignifiantes pour lesquelles il refusait de se faire évacuer. Il avait gagné sa Croix de guerre et sa Légion d’honneur à force de bravoure entraînante et de mépris de la mort. Malgré son air sérieux, Kéravan montrait dans l’intimité joyeuse de ces repas en commun une pointe d’esprit qui souvent frappait juste; il avait une manière à lui de jeter son mot piquant dans la conversation quand il était en belle humeur. Alors ses camarades déclaraient: --Voilà l’homme sérieux qui s’émancipe! A cause de la distribution des lettres, on parla de Paris, de ses plaisirs... presque tous en étaient ou y avaient vécu, ils
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