Les rubis du calice
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il n’y avait plus de chemins ni de poteaux indicateurs. Mon seul Guide étant parti, j’errais, horriblement solitaire, comme au hasard. J’essayais de prier, mais toutes mes prières, en vain dardées vers le ciel, retombaient autour de moi, comme une poignée de sable sur une terre à jamais aride: elles se dispersaient au souffle des vents âpres qui balaient cette noire étendue. Si je faisais effort pour les renouveler, je ne parvenais à les articuler qu’avec ennui et dégoût. Je tentais de me réfugier dans l’Évangile, verger miraculeux où, naguère, Jésus m’avait permis de récolter les fruits suprasubstantiels de son enseignement. Mais il me sembla que c’était un enclos où ne végétaient que des arbres stériles. Bientôt il me devint impossible de prier ou de concevoir une fin à cet abandon. Le désert intérieur reculait ses limites à l’infini; les ténèbres devenaient de plus en plus épaisses. Elles pesaient si fort que mon âme fléchit. Gisante sur le sol, ne pouvant même pas pleurer, suant une sueur sanglante, elle demeurait inerte dans le silence affreux que déchirait parfois le rire funèbre de celui qui se nomme: le père de la désespérance éternelle. Qu’il voyait juste l’éprouvé qui a dit: «Passer par cette nuit, c’est ressentir l’avant-goût de la damnation!...» Je croyais que Jésus était parti pour toujours. Et pourtant, sans que j’en eusse la moindre conscience, sa grâce latente persistait puisqu’il me fit sentir, d’une façon tout instinctive, qu’il ne fallait abandonner ni la messe, ni les Sacrements, ni l’oraison--malgré la répugnance que mon imagination m’inspirait à l’égard de ces pratiques salutaires. Un jour enfin, après des mois vécus dans cette ombre rigide, le sentiment me vint que cette peine m’était infligée à cause de mon trop d’attache au monde. Oui, trop de préoccupations humaines s’étaient mêlées à ma bonne volonté d’aimer Jésus. Par amour-propre, je m’étais miré dans mes œuvres à son service. D’où, mille ferments mauvais m’avaient empoisonné l’âme. Pour la purifier, pour y allumer une flamme sans fumée, il m’avait plongé dans cette nuit dont on ne peut sortir que l’orgueil brisé par l’agonie d’une nouvelle conversion. Cette intuition bénie me fut donnée un matin où, avant la messe, je regardais le tabernacle:--Humble pour nous instruire, me dis-je, Il se cache là sous le voile des Saintes-Espèces. Et moi, je n’ai pas encore appris à recevoir cette leçon avec humilité!... Ce fut un trait de lumière qui me fit comprendre ma pénurie d’amour véritable et mon indignité. La messe commença. Je me vis alors au pied d’une montagne dont il me fallait gravir la pente ardue pour gagner le sommet où je sentais que la Face de Jésus allait bientôt rayonner comme un soleil aux splendeurs immuables.
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